Témoin

Je raconte l'époque grâce aux livres, aux films et aux gens.

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Par Tanguy DESCAMPS
12 avr. · 1 mn à lire
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Simon Parcot et la sagesse de l'abandon

Aller jusqu'au bord du monde (le tenter au moins)

Bonjour 🏔️

En tête de cordée, Gaspard veut atteindre “La Grande”, mystérieux sommet drapé de brume, qui semble inaccessible. Métaphore probable du chemin vers Dieu ou l’éternel, cette quête amène avant tout à une réflexion sur l’intériorité : et si, voulant “aller là-haut”, ce n’était pas une plongée intérieure qu’il opérait finalement ?

Ainsi pourrait-on résumer “Le bord du monde est vertical” (2022) de Simon Parcot, premier roman aux éditions “Le mot et le reste”.

J’en ai retenu deux citations, qui disent la vanité des “objectifs en tant que tel”, des “buts à atteindre absolument” :

“Et si le sommet véritable ne se dévoilait qu’aux renonçants ?” (p. 59).

👉 Le sommet est-il vraiment atteint par celui qui veut tout contrôler du chemin y menant ? N’y a-t-il pas une éthique du lâcher-prise, voire du renoncement, à explorer, contraire à celle de l’accomplissement qui irrigue nos pensées consuméristes ? Et si, au final, “ne pas avoir” ou “ne pas faire”, permettait d’accéder plus profondément au but recherché, par l’imagination ou des chemins détournés ?

“Si je grimpe, c’est pour redescendre…” (p. 112).

👉 Loin de vouloir aller au sommet pour y rester, Gaspard évoque l’importance du retour, de la descente vers la vallée qui lui est chère. Il est malsain de “rester en haut”, dans une forme d’ivresse des cimes qui subjugue mais risque à force d’entretenir une attitude hors-sol. Redescendre, c’est prendre le temps de la relecture, de l’atterrissage, de la reconnexion au quotidien sans lequel l’aventure ne serait pas.

Outre un prétexte à des pensées philosophiques, “Le bord du monde est vertical” est également un très beau roman, qui nous nourrit de passages comme celui-ci, avec lequel je vous laisse :

“Le monde est bien plus vaste que ce que nous pensons. Nous passons notre vie à le réduire, ramenons l’inconnu au connu et réduisons la différence au semblable. L’ailleurs ne nous échappe plus, nous avons oublié les surprises. Nous vivons dans nos territoires, nous habitons les mêmes lieux et aimons les mêmes personnes jusqu’à dire “le monde est comme ceci”. Mais le monde n’est pas comme ceci. Il est bien plus vaste que ce que nous pensons. Il est un réservoir infini de nouveautés, un fauve qui se dérobe, un immense tableau qui demande à être dévoilé. Marcher vers le Bord du monde nous enseigne cela. Chaque pas ne rapproche pas du but, il nous en éloigne. Chaque pas est une déprise de soi qui nous rapproche de la vérité, qui n’est rien d’autre que l’oubli.” (p. 109).

Alors, bon weekend d’abandon 😉

Tanguy.

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